La rupture conventionnelle du contrat de travail est nulle si le délai de rétractation n’est pas respecté

Share This Story, Choose Your Platform!

Cass. soc. 6-12-2017 n° 16-16.851 F-D, Sté Paris Meuble c/ K.

L’envoi d’une demande d’homologation d’une convention de rupture après le délai de rétractation est une formalité substantielle dont le non-respect entraîne l’annulation de la convention.

Pas de demande d’homologation avant la fin du délai de rétractation

Selon le Code du travail, la partie la plus diligente à la convention de rupture ne peut adresser une demande d’homologation à la Direccte qu’au lendemain de la fin du délai de rétractation de 15 jours. Il s’agit là d’une formalité substantielle de la procédure de rupture conventionnelle qui garantit aux parties la possibilité d’exercer pleinement leur droit à rétractation. Ainsi, en principe, la Direccte ne doit pas homologuer une convention de rupture si elle lui est adressée avant la fin de ce délai.

Dans l’affaire soumise à la cour d’appel, dont la solution est approuvée par la Cour de cassation dans son arrêt du 6 décembre 2017, l’administration avait implicitement homologué une convention de rupture, alors que l’employeur avait adressé sa demande avant la fin du délai de rétractation. A tort, selon le juge, qui fait droit à la demande du salarié et considère que la convention n’aurait pas dû être homologuée, qu’elle est nulle et doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ainsi, un salarié privé d’une garantie prévue par la loi peut demander l’annulation d’une convention de rupture sans qu’il ait besoin dans ce cas d’établir l’existence d’un vice du consentement.
Si cette solution n’est pas nouvelle, elle est toutefois l’occasion de rappeler les règles applicables en matière de délai de rétractation, compte tenu de l’obligation faite aux parties de le respecter scrupuleusement.

Attention à bien décompter le délai de rétractation

Les parties à une convention de rupture peuvent se rétracter dans un délai de 15 jours calendaires qui démarre au lendemain de la date de signature de la convention et se termine au quinzième jour à minuit.
En application du principe fixé à l’article R 1231-1 du Code du travail, lorsque ce délai expire un samedi, un dimanche, ou un jour férié ou chômé, il est prolongé jusqu’au premier jour ouvrable suivant. L’administration a bien précisé que les parties à la convention doivent prendre en compte l’application de cette règle de computation, sous peine de refus d’homologation de la rupture conventionnelle (Circ. DGT 2009-5 du 17-3-2009).
A toutes fins utiles, le ministre du travail a mis en place un simulateur de calcul du délai de rétractation (www.telerc.travail.gouv.fr).

Exemple Si une convention de rupture est signée le jeudi 1er février 2018, le délai de rétractation expire le vendredi 16 février à minuit. Les parties à la convention peuvent demander l’homologation à partir du samedi 17 février 2018.
Mais si une convention de rupture est signée le vendredi 2 février 2018, le délai de rétractation expirant le samedi 17 février à minuit, il doit être prorogé jusqu’au lundi 19 février. La demande d’homologation ne peut être adressée qu’à compter du mardi 20 février 2018.

Une erreur de décompte du délai dans la convention n’affecte pas forcément sa validité

Si la Cour de cassation est stricte s’agissant du respect du délai de rétractation, elle sait se montrer plus souple en revanche en cas d’erreur commise par les parties sur la convention de rupture dans le calcul de ce délai, notamment sa date d’expiration. Cette erreur ne peut entraîner la nullité de la convention que si elle a eu pour effet de vicier le consentement de l’une des parties ou de la priver de la possibilité d’exercer son droit à rétractation (Cass. soc. 29-1-2014 n° 12-24.539 FS-PB : FRS 4/14 inf. 5 p. 13 s.). En clair, peu importe que la date de fin du délai indiquée dans la convention soit erronée, la convention est valable si les parties ont bien bénéficié d’un délai de 15 jours pour se rétracter.

La lettre de rétractation doit attester de sa date de réception

Selon les dispositions du Code du travail, le droit à rétractation est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie. L’administration préconise à cet effet soit la lettre recommandée avec demande d’avis de réception, soit la lettre remise en main propre contre décharge mentionnant la date de remise (https://www.telerc.travail.gouv.fr).

Terme du délai : faut-il retenir la date d’envoi de la lettre ou celle de sa réception ?

Il est permis de se demander à quelle date il convient de se placer pour déterminer si une rétractation est intervenue hors délai ou pas : est-ce la date d’envoi de la lettre par la partie qui se rétracte ou la date de sa réception par l’autre partie ? La Cour de cassation n’a pas encore été amenée à se prononcer sur la question.

A notre avis Pourrait-on appliquer, en la matière, les règles de droit civil ? Selon l’article 1122 du Code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, la loi ou le contrat peuvent prévoir un délai de rétractation avant l’expiration duquel son bénéficiaire peut rétracter son consentement. Ce texte s’applique notamment en matière de vente par correspondance ou de vente immobilière.
Cette rédaction laisse à penser que le droit à rétractation peut être effectivement exercé jusqu’à son terme : ce serait donc à la date d’envoi de la lettre de rétractation qu’il conviendrait de se placer.

 

Source Editions Francis Lefebvre https://www.efl.fr/

By Published On: février 12th, 2018Categories: Droit socialCommentaires fermés sur La rupture conventionnelle du contrat de travail est nulle si le délai de rétractation n’est pas respectéTags: , ,